L'eau est encore froide dans la casserole.
Plus il la regarde et plus ses doutes s'envolent.
Il enclenche le bouton de la cuisinière.
Le gaz s'échappe et parfume doucement l'air.
Le feu lèche le cuivre. Il danse et ondule
Autours du cul de la casserole qui brûle.
La chaleur monte déjà jusqu’à son visage,
Calmante, minaudante, flattant son courage.
Il regarde une dernière fois ses deux mains.
Il ne les verra plus, tout ira mieux demain.
De ces doigts fins il sera enfin libéré.
Ces mains de femme il ne devra plus supporter.
Il plonge alors les deux choses blanches dans l’eau,
Tout juste tiède. La chaleur va crescendo.
On atteint maintenant les cinquante degrés.
Il ferme les yeux et se met en apnée.
Il arrive au passage le plus douloureux.
L'eau pique et brûle et amène les larmes aux yeux.
Il se concentre sur cette vive souffrance
Et l’accepte : ce sera son auto-sentence.
Comment supporter chaque jour de voir ces mains ?
Ces mains de mari déchu, ces mains d’assassins ?
Qui se sont fermées autours du cou de sa femme
Qui, en le trompant, en son sang porta l'infâme ?
Pardonnons le, il avait perdu ses esprits.
L'horrible action fut causée par la jalousie.
Pourrait-on reprocher à une âme blessée
De s’être grâce à l’assassinat délivrée ?
Il a arrêté de ressentir la douleur.
Son visage est à présent noyé de moiteur.
Aucune chaleur : l'eau est douce sur ses doigts.
Le liquide si chaud, en est devenu froid.
Et d'un rouge vif est bientôt colorée l’eau.
Délivrant cet homme d’un énorme fardeau,
Car il obtient le pardon en se châtiant
Et s’en vont ses péchés avec son sang…
une reflexion sur le meurtre... à vous de l'interpréter comme vous le voulez.